De la souffrance éthique

Déclaration lue au comité sociale académique départemental du 2nd degré le 25 mars 2024. Vote contre l'enveloppe. Les raisons de l'inquiétude pour la rentrée 2024 et d'un malaise grandissant face à des conflits éthiques majeurs.

Vote contre l’enveloppe 2nd degré

Lorsque le Sgen-CFDT vote contre le projet de carte scolaire du 2nd degré, il vote contre l’enveloppe attribuée qui ne permet d’assurer ni les conditions de travail nécessaires pour atteindre des objectifs ambitieux ni les moyens suffisants à la mise en œuvre de dispositifs par ailleurs contestables.

Ces instances sont aussi pour nous, représentants du personnel, une tribune qui permet de porter la voix de tous les personnels qui seront impactés par ces mesures dans le cadre général d’une politique qui impose toujours plus d’objectifs et ce dans l’instabilité et l’agitation.

Des marges de manœuvre locales réduites à peau de chagrin

Ainsi, la marge de manœuvre est cette année plus étroite que jamais dans notre département et, ce faisant, le dialogue, d’aussi grande qualité soit-il, ne se concrétise que trop rarement par des évolutions positives. Il y a là quelque chose de vain. Et pourtant l’enjeu n’est pas mince. Il est
celui d’une école qui est un pilier de notre République, une école à qui l’on prête tous les maux et en même temps tous les espoirs, toutes les ambitions. Mais sans moyens, l’ambition n’est rien.

Inquiétudes sur les « réajustements » en juin ou comment tout remettre en cause d’un coup

De fait, nous réitérons nos craintes pour le mois de juin à venir. Quelques élèves en moins et ce sont des services à revoir et donc une déstabilisation des équipes dans un contexte où les conditions de mise en œuvre des groupes de besoin en collège ne sont pas assurées, faute de moyens suffisants.

Il apparaît plus que nécessaire que les collègues concernés bénéficient d’un temps de décharge et d’une formation spécifique, sur le temps scolaire, à la hauteur d’un projet aussi conséquent. Nous avons besoin de moyens, mais nous avons aussi besoin de temps. Les dispositifs précédents sont ainsi balayés d’un revers d’annonces sans avoir jamais été évalués et il faut déjà se remettre à la tâche dans l’urgence et l’épuisement… On nous annonce le meilleur, nous pressentons le pire.

Stop à la verticalité

Plus globalement, et comme nous l’avions déjà évoqué lors des instances du 1er degré, nous faisons le vœu d’une gouvernance au niveau national qui soit moins verticale, une gouvernance qui reposerait sur l’écoute des acteurs de terrain et des corps intermédiaires, une gouvernance qui ne serait pas dans la précipitation voire l’agitation, une gouvernance qui n’afficherait pas publiquement ses incohérences.

De la dignité au travail

Car les conséquences d’une telle gouvernance posent la question de la dignité au travail, ce que le psychanalyste Christophe Dejours a nommé la souffrance éthique. Les conditions de travail sont telles aujourd’hui que nous pourrions passer à tout moment de maltraités à maltraitants.

Nous sommes en train de brader notre qualité de travail pour répondre à des exigences toujours accrues, toujours remises en question. Et finalement, nous nous trahissons lorsque nous participons à la mise en œuvre de groupes de niveau que nous savons contestés par la recherche scientifique.

Nous nous trahissons également lorsque nous acceptons toujours plus de missions en sachant pertinemment que nous ne ferons plus aucune de celles-ci au mieux… Et nous trahissons par la
même nos élèves et leur famille.