Ecriture inclusive : au delà du symbole

De l'écriture inclusive on ne parle trop souvent que du point médian, ce point placé au milieu de la ligne et permettant d'accrocher les signes grammaticaux du féminin au milieu des signes du masculin.

Du point qui cache l'écriture comme l'arbre cache la forêt.....pour en savoir plus sur l'écriture

Lecture ou écriture ?

Les détracteurs du point médian connaissent mal l’écriture inclusive et font souvent preuve d’une grande mauvaise foi. Le point médian rendrait la lecture à voix haute difficile par exemple. Or si l’on parle d’écriture, c’est bien parce qu’il s’agit là d’un signe fait pour la lecture et non pour l’oral. Si on doit lire un texte à voix haute, il est tout à fait aisé de remplacer « adhérent·e·s » par les « adhérentes et les adhérents ». Si je ne veux pas oublier quand j’écris que nos adhérents peuvent aussi bien être des femmes que des hommes, il est beaucoup plus rapide d’utiliser le point médian que de répéter le mot dans sa version féminine puis masculine (et dans cet ordre plutôt que l’inverse, remarquons que pendant des années on a parlé d’égalité hommes-femmes, continuant de mettre le mot hommes en premier….). Evidemment quand je prononce un discours, il me suffit de reprendre les deux termes…..

Du respect des règles grammaticales

Les détracteurs de l’écriture inclusive en appellent aussi au respect des règles grammaticales et s’offusquent de néologismes suscités par l’écriture inclusive. C’est oublier un peu vite que les règles grammaticales ne sont pas immortelles, elles ont une histoire elle aussi (souvent sexiste….) et que la langue évolue tous les jours. Nos ami·e·s québécois·e·s le savent bien, eux qui veulent faire vivre la singularité du français !

Un gadget ?

Enfin, les détracteurs de l’écriture inclusive utiliseront l’argument maximaliste « ce qui compte c’est le réel et non ce qui le représente; changeons le réel, l’écriture suivra ». Le maximalisme est un allié du conservatisme. L’écriture ne fait pas que refléter le réel, elle le forme aussi si elle perpétue des stéréotypes ….. Et un combat n’en empêche pas un autre ! Un jour en classe je traduisais avec des élèves une épitaphe latine. La femme décédée était qualifiée de « medica », dans l’esprit d’un des mes élèves, il ne pouvait s’agir que de médecine (alors que ce serait « medicina ») et non de femme-médecin. Bien sûr, l’élève pouvait imaginer que dans une société antique il n’y avait pas de femmes médecin mais notre vocabulaire français lui-même a exclu cette possibilité alors qu’en latin les deux existent, medicus pour l’homme et medica pour la femme….(cf le guide femme, j’écris ton nom).  Notre discours influence notre pensée.

Au delà du point médian, l’écriture inclusive propose bien d’autres pistes. Il faut renoncer au masculin générique (« les acteurs du développement durable »), préférer les termes épicènes (« artiste ») par exemple.

Pour finir, un mot sur la question des accords et du masculin qui l’emporterait. Signalons que même en latin, notre langue mère, si la règle existe, une autre règle est couramment pratiquée, celle de l’accord avec le plus rapproché, c’est-à-dire avec le mot le plus près dans la phrase, au risque même parfois que ce mot soit au neutre ! Ainsi « pulchrum est templum et custos » : le temple et le gardien sont beaux, qu’il faudrait traduire pour coller à la structure syntaxique latine « beau est le temple, comme son gardien ». Cet accord qui mêle nom de personnes et nom de choses est même obligatoire. Qu’on ne vienne donc pas arguer de règles immémoriales….