Après un groupe de travail le 14 mars examinant les mesures de suppression de poste, les très rares mesures de création et les compléments de service dans le second degré en Côtes d'Armor, a eu lieu le comité pour ratifier ces mesures. Voici la déclaration de notre représentante Laurence Faleur
Groupe de niveau : à quoi s’en tenir ?! On est contre !
Au sommet de l’État, la situation semble plus confuse. Gabriel Attal, ministre de l’Education Nationale en octobre 2023, introduit et assume les groupes de niveau au collège pour la rentrée 2024. Passons sur la parenthèse désastreuse de la ministre Oudéa Castera pour en venir à l’assouplissement annoncé par Mme Belloubet en fin de semaine dernière. Cette inflexion habile est aujourd’hui percutée par la parole du premier ministre qui maintient la logique initiale de groupe de niveau. Nous sommes loin d’une politique éducative d’envergure, riche de sens et donc de cohérence ! Annoncer une école de l’ordre et du classement prenant exemple sur un passé fantasmé ne constitue pas une politique d’éducation, surtout quand on fait fi des réalités du terrain et de ses acteurs.
Le SGEN-CFDT maintient bien évidemment son opposition à cette politique du tri dont les effets délétères pour les élèves les plus fragiles ont été démontrés par la recherche.
Pas de moyens pour ces groupes, des effets organisationnels catastrophiques
Rappelons que pour la rentrée 2024, notre académie n’a pas reçu de moyens complémentaires. La taille des groupes de niveau sera donc trop élevée, les petits établissements sont toujours face aux mêmes difficultés d’organisation et les enseignements en barrette induisent une augmentation du nombre de BMP. Pour notre département, 36 BMP en lettres modernes en 2024, c’était 32 en 2023 ; 33 BMP en mathématiques en 2024, c’était 30 l’année dernière. La mise en barrette des groupes, nécessaire à leur malléabilité, implique que les collègues n’aient qu’un groupe par niveau. C’est une nouvelle dégradation de leurs conditions de travail. Ils pouvaient jusqu’alors prendre deux divisions sur un seul niveau.
Dégradation des conditions de travail
Cette énième dégradation s’ajoute à bien d’autres : la deuxième heure supplémentaire imposée, le pacte, la formation continue hors temps de travail, les missions de référent, certes nécessaires et parfois passionnantes, mais qui viennent toujours en plus. Concernant les heures supplémentaires, à la rentrée 2024, dans notre département, les HSA représenteront 6,9 % des DGH en collège, 11,9 % en lycée. C’était 1,3 point de moins en 2015 au collège, quasiment 3 points de moins en lycée. La charge de chacun ne cesse de s’alourdir.
Opposition de fond au choc des savoirs
Plus largement, concernant le choc des savoirs, le SGEN-CFDT persiste à rejeter le brevet envisagé comme examen de passage et questionne la mise en place de la classe prépa-seconde dont les modalités et les moyens ne sont toujours pas précisés.
La technologie sacrifiée
Plus largement encore, cette politique du choc des savoirs ne doit pas occulter les conséquences des précédentes réformes particulièrement douloureuses pour certains collègues. La technologie paye encore un lourd tribut cette année : 10 postes sont supprimés, c’était déjà 13 l’année dernière, s’y ajoutent 7 compléments de service.
Difficultés en LGT et LP
Dans les lycées, on tente toujours de respecter l’esprit de la réforme sans moyens suffisants ; les spécialités se disputent les élèves de crainte de perdre un groupe. Le lycée professionnel subit, quant à lui, depuis plusieurs années des changements incessants et les collègues s’interrogent sur l’évolution annoncée de la carte des formations. Par ailleurs, tous les établissements s’inquiètent des évolutions de structure au mois de juin si quelques inscriptions venaient à manquer. Quelques élèves en moins pourraient générer la suppression d’une, voire deux divisions, la révision de la répartition des moyens et potentiellement la création de nouveaux compléments de service.
Des empilements de réforme et des personnels en souffrance
Perdre toujours et encore des moyens, se sentir toujours plus fragilisés devient insupportable, inacceptable. Le nombre de fiches SST en atteste et ce, quelles que soient les catégories de personnels. Ça craque. Nos établissements sont traversés par le découragement, voire l’épuisement, face à une inclusion bien évidemment nécessaire mais qui se fait sans moyens à la hauteur de l’enjeu. Ils sont traversés par la fatigue face à cet empilement de réformes mal calibrées car précipitées. Ils sont traversés par la colère face à l’absence de reconnaissance de notre expertise et l’absence de réel dialogue. Certes, nous travaillons aujourd’hui la question des moyens enseignants du 2nd degré mais c’est l’ensemble des métiers du service public d’éducation qui souffre. Nous espérons qu’aucune de ces catégories de personnels n’aura à payer le prix des 700 millions que notre ministère doit rendre seulement quelques mois après l’adoption du budget.
Écart public-privé et séparatisme social
L’école publique souffre, elle craque. Elle s’enfonce dans la crise comme on s’enfonce dans des sables mouvants. Plus on s’agite, plus on s’enfonce. Il est urgent de prendre le temps de la réflexion. Les personnels souffrent de voir leur école s’abîmer, et notamment, de voir l’écart entre l’école publique et l’école privée s’accentuer. Dans le privé, la proportion d’élèves favorisés ne cesse d’augmenter, celle des élèves défavorisés de baisser. Le phénomène inverse est observé dans le public. En Bretagne, dans un contexte de baisse démographique, la concurrence avec le privé, dont la place est forte, s’exacerbe. Faute de moyens complémentaires, comment rester attractifs quand on doit rogner sur les quelques atouts dont on disposait encore ? Pouvons-nous continuer à accepter une telle évolution qui sonne le glas du vivre ensemble ? L’école, si elle est une vraie priorité, ne mérite-t-elle pas une politique ambitieuse, durable, soutenable et juste, loin de la frénésie de communication et de la précipitation actuelles ?