À l'heure de l'annonce de suppressions massives de postes dans le 1er degré, quel peut être l'avenir des petites écoles rurales ainsi que des petits collèges bretons, dans un contexte où 40% d'élèves sont scolarisés dans l'enseignement privé ?
Notre compte-rendu du CSA académique du 15 octobre
L’école rurale du futur sera-t-elle une école fermée ?
Le rectorat constate une perte d’élèves de 1.2%, moins rapide que celle de l’an dernier (1.4%).
Cela représente 1880 élèves de moins en élémentaire et 718 en maternelle. Le rythme de la baisse est à peu près identique pour le Finistère et les Côtes d’Armor, elle s’accentue en Ille et Vilaine.
Une collègue d’une autre organisation syndicale fait le constat que le moment de saisie dans Onde ne permet pas de comptabiliser les enfants du voyage comme parfois les primo-arrivants.
Comme d’habitude, un débat s’installe en relation avec le nombre d’enfants de 2 ans accueillis dans l’académie (4839 dans le public). En attendant le Conseil Académique de l’Education nationale de novembre, il nous manque les données concernant le privé.
Le document de travail nous interroge : il y a moins d’élèves que prévu en maternelle (en tenant compte des prévisions INSEE) .
Y aurait-il un effet d’aubaine dû au financement de la scolarisation des 3 ans pour le privé ?
Le rectorat sans pouvoir à ce stade nous fournir de chiffres précis annonce une baisse des effectifs du privé légèrement moins importante que celle du public et explique malgré tout ces diminutions par la baisse de la démographie. En ce qui concerne l’accueil des deux ans, il rappelle que les TPS ne comptent que pour compléter un effectif sauf en éducation prioritaire.
Il constate une tradition bretonne d’accueil important des deux ans qui a par contre coup asséché les structures d’accueil des services de la petite enfance.
De la nécessité d’un véritable projet éducatif tenant compte de la diversité des territoires.
Nous interpellons sur les risques de désertification des campagnes. La question du maillage territorial est un problème politique. Le sentiment d’abandon génère une révolte qui fait monter l’extrême droite, ou il suscite des démissions silencieuses, des renoncements successifs. Voire les deux.
C’est ce qui se produit avec la démission du maire de Plussulien. Les habitant·es de ces communes se sentent impuissants et ont l’impression que ce mouvement est irréversible. Avec l’école, c’est l’attractivité d’une commune qui s’effondre avec le sentiment qu’elle n’a plus d’avenir. Il faut une vision pro-active, proposer des solutions positive et pérennes pour éviter ce sentiment d’abandon. La gestion du déclin démographique peut être vécue autrement.
En termes de RPS pour les professionnels, c’est juste désastreux d’avoir cette épée de Damoclès au dessus de la tête avec la lancinante question – quand mon poste va-t-il sauter ? – mais plus pernicieux encore le sentiment diffus d’inutilité de sa mission puisqu’on peut la supprimer à tout moment.
Pour nous, il devient urgent de se poser collectivement ces questions et de ne pas avancer au coup par coup.
- Quel est le temps de déplacement acceptable entre le domicile des familles et une école maternelle et primaire pour leur rythme de vie ?
- Quel effet en termes de développement durable ?
- Quelle taille d’établissement – école, collège – devient la taille critique ?
- Quel parcours on propose aux familles, jusqu’où sur place : de la maternelle au collège, au lycée ?
Et que devient l’annonce du recteur dans ce contexte d’un projet autour de l’école rurale du futur ?
Le cas particulier des RPI
Certes il reste deux classes sur le secteur de Plussulien mais quelles conditions de travail quand il y a une classe unique avec 5 niveaux ?
Le Dasen 22 répond que le RPI Plussulien/Saint-Mayeux passe de trois classes à deux. L’école est toujours là. Il y a 25 élèves 5 niveaux, à la rentrée il y aura 46 élèves dans ce RPI mais la répartition pédagogique appartient aux enseignants. Par ailleurs, 7 élèves sont en toute petite section. Faut-il maintenir 3 postes pour 39 élèves ?
Si nous interpellons ainsi sur Plussulien, c’est en raison de la problématique des RPI, promus par l’institution dans le passé comme une solution de maintien, désormais eux aussi touchés par les fermetures. La question centrale n’est pas le maintien de l’école mais les conditions de ce maintien, la qualité de l’offre éducative, la stabilité des équipes lorsque les conditions d’exercice se dégradent et le sentiment de perte que génère les fermetures de classes, les unes après les autres.
Le DASEN 22 indique qu’une extension du RPI sur Bon Repos est à l’étude. Comment pouvions-nous en être informés ?
Il rappelle tout le travail autour de la mise en place des territoires éducatifs ruraux et le travail partenarial avec les élu·es que cela implique.
La position du recteur
Le recteur confie son attachement à la ruralité dont il est issu. Il confirme la tenue d’un séminaire sur l’école rurale qui aura lieu dans un premier temps à l’échelle départementale puis académique. Il nous informe que les représentants des personnels y seront associés.
Pour finir, il partage ses interrogations : Comment garder une école publique attractive ?
Aujourd’hui les transferts du public vers le privé sont en hausse. Cette situation doit aussi interroger les élus locaux.
Ils veulent » leur » école, « leur » université et lorsqu’ils n’ont pas gain de cause auprès de l’enseignement public ils se tournent vers le réseau privé. (Exemple de l’implantation de l’Université Catholique de l’Ouest)
Les contraintes budgétaires ici sont plus fortes que dans d’autres académies. Avec en plus la place du breton qui a un coût : 76 millions d’euros par an.
Et dans le second degré ?
On constate une baisse d’effectifs de -0.9% pour les deux réseaux. Par contre le réseau public accueille nettement moins d’élèves qu’attendus alors que réseau privé en accueille plus.
L’écart se marque surtout en collège, en particulier en Ille et Vilaine. Là où d’habitude on note un solde de flux entre le privé et le public d’environ 850 élèves, on le chiffre à à 1200 pour cette rentrée.
Il y a un écart par rapport à la prévision. Le rectorat prévoyait une baisse de 700 élèves en collège, nous en avons perdu 1375 en soit -1.5%. La baisse la plus forte est celle des Côtes d’Armor.
La hausse en revanche se marque plus fortement que prévue en LP. On constate une baisse générale des effectifs en LGT qui ne peut s’expliquer par le seul report des élèves en voie professionnelle. Elle est particulièrement marquée dans le Finistère.
La hausse se poursuit dans le supérieur (+3%).
Groupes de niveau et concurrence déloyale
Effet des réformes
Le choc des savoirs a sans doute généré une perte d’effectifs dans le public, partis vers le privé en collège mais également pour le passage en 2nde. Nous formulons l’hypothèse que des familles ont eu peur de la mise en place des groupes de niveau. Le privé s’est vanté de ne pas les appliquer en raison de l’absence de moyens.
Nous déplorons unanimement cette nouvelle conséquence d’une réforme que nous avons dénoncée.
Seul le Morbihan est dans un flux inversé et contre-intuitif. Pour les 3 autres départements c’est moins le cas, particulièrement en Ille et Vilaine. La Bretagne connait un solde migratoire positif mais les élèves nouvellement arrivés sont inscrits dans le privé ce qui est un phénomène nouveau. La valse des réformes produit un effet néfaste sur le moral de nos collègues mais il est également possible que les familles, à tort ou à raison, préfèrent une apparente stabilité dans le privé.
Opacité des financements et de leur gestion
Plus largement, au nom de la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques Bretagne, nous pointons l’opacité qui règne sur la gestion des fonds publics y compris académiques.
La liberté du privé à disposer des moyens attribués, lui permet de sur-doter les lycées afin d’afficher plus de spécialités attractives au détriment du primaire.
Nous déplorons un pilotage du système par la fin – le bac – mais puisqu’il existe actuellement il faut bien en tenir compte et jouer à armes égales.
Le service public ne joue pas non plus à armes égales quand en centre Bretagne la cité scolaire de Quintin propose une continuité de parcours jusqu’au bac avec un service de transport impeccable là où le public « exporte » ses élèves à Guingamp avec un ramassage à la traîne (les trajets des week-ends des internes ne sont possibles que depuis peu d’années) .
Il ne s’agit pas de complémentarité des réseaux mais de concurrence déloyale.
Le DASEN22 nous répond sur le collège St Nicolas du Pelem. Il y a plus d’élèves présents qu’attendus 130 sur 7 divisions avec un projet pédagogique de qualité.
Quelle taille minimale pour un collège ? De la bivalence
Nous citons le dispositif Rebond du CD22. Il s’agit de travailler sur les zones fragiles en termes démographiques pointées par la cour régionale des comptes. L’objectif est de maintenir des établissements à deux divisions par niveau. Est-ce la taille pertinente pour un collège rural ? Nous ne le savons pas mais il nous semble indispensable de se poser collectivement cette question.
Nous pensons également indispensables de faire preuve de volontarisme sur la bivalence malgré l’absence de consensus syndical. En effet, nos collègues devraient pouvoir avoir le choix entre exercer entre plusieurs établissements et se former pour une autre valence. Attendre d’être au pied du mur pour se poser la question n’est pas une bonne idée. La démographie va rendre ces questions inéluctables. L’administration doit permettre d’éclairer ces choix et les anticiper.
La secrétaire générale nous répond qu’il y a des zones où les personnels en accord avec les équipes de direction et d’inspection ont posé la question dès janvier, dès l’annonce du choc des savoirs. En effet, il faudrait envisager un bilan de ces expériences.
Nous n’avons pas eu le temps de le dire à l’administration mais nous y reviendrons car l’anticipation d’une année sur l’autre nous semble insuffisante. C’est au moins deux ou trois ans en amont qu’il faudrait accompagner les collègues déjà en poste sur des zones en tension sur ces réflexions !
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